Littérature„1812: le fiancé de Russie“ par Anne Villemin-Sicherman se déroule à Metz

Littérature / „1812: le fiancé de Russie“ par Anne Villemin-Sicherman se déroule à Metz
 Photo: DeuxPlusQuatre, CC BY-SA 4.0 , via Wikimedia Commons

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Lauréate du Prix Historia 2019 du roman policier historique pour „L’Abbé Grégoire s’en mêle“, du Prix Littré du roman pour „Rumeur 1789“ ainsi que Prix „Romans et nouvelles“ des conseils départementaux de Lorraine pour „1803, la nuit de la sage-femme“, Anne Villemin-Sicherman confirme son statut de „thrilleriste“ historique en publiant „1812: le fiancé de Russie“.

Cet ouvrage est son dixième opus et en même temps le deuxième tome de la „Série Victoire Montfort“, qui met en scène un nouveau genre de sage-femme enquêtrice dont le récit plonge le lecteur dans un polar historique sous-tendu par un cadre contextuel porteur – la ville de Metz en 1812, date de la venue de l’Empereur dans une ville désormais en ébullition, ainsi qu’un tissu narratif s’appuyant sur un crime – celui d’un jeune garde – que Victoire Montfort (épouse du commissaire de police Montfort) va s’employer à élucider.

De structure tripartite et introduit, à la manière d’une pièce de théâtre, par la liste des personnages, l’ouvrage d’Anne Villemin-Sicherman s’ouvre sur une copieuse première partie (occupant quelque deux cents pages et organisée chronologiquement du 10 mai au 24 juin 1812), qui évoque en premier lieu la visite de l’Empereur et de l’Impératrice à la préfecture de Metz. Léonard Legrand, un garde d’honneur, qui, après avoir abusé du vin, s’est retrouvé mêlé à une querelle avec un officier élève de l’Ecole d’artillerie (Thomas Drouin), s’affaire pour rejoindre son poste. Deux jeunes élégantes (Clémence et Bertille) s’entretiennent. La „vieille Célestine“ prophétise: des malheurs, de terribles désastres s’annoncent! Faire la guerre à la Russie est une chose, mais qu’en est-il de la flambée du prix du blé qui fait de nombreux mécontents? Léonard, mortellement blessé par des balles tirées par un homme aux cheveux noirs, s’écroule au moment où se termine la canonnade. Il est retrouvé „face contre terre, le crâne éclaté et la cervelle dehors“. Le cadre est planté. L’enquête peut débuter.

C’est avec habileté et avec un sens aigu du suspense que l’auteure met en place les différents éléments constitutifs de la trame narrative et de l’enquête policière qui la sous-tend. L’absence de Léonard Legrand a été remarquée. Il s’agit de reconstituer son emploi du temps, de vérifier ses fréquentations, d’interroger son entourage proche, à commencer par Pauline Jardot, qui déclenche une procédure pour disparition de son fiancé. Cette dernière fait l’objet de certaines convoitises. Elle reçoit également des menaces. La jalousie et les menaces peuvent être liées à la mort de Léonard Legrand? Ce crime serait-il en rapport avec le trafic auquel se livre un certain nombre d’habitués de l’„Hôtel de France“? Celui qui s’est battu en duel avec le garde d’honneur fait par ailleurs partie des cinq soldats partis le lendemain pour la Russie. L’enquête est menée par Victoire Montfort (dont la curiosité est aiguisée) avec finesse et perspicacité: en considérant la place des blessures du défunt garde, peut-on déduire ce qu’il en est des angles de tir? De l’endroit d’où sont partis les coups de feu, de l’identité du tueur? Comment interpréter la disparition de Pauline? Des élèves de l’École d’artillerie trempent-ils dans des activités illégales portant par exemple sur le tabac, les étoffes d’Angleterre ou les produits coloniaux – ce qu’Olry Terquem, ancien professeur de mathématiques à Polytechnique, semble ne pas pouvoir concevoir? Que révèlent certains interrogatoires comme celui, par exemple, des parents de Léonard Legrand?

Lien entre les époques

La deuxième partie (qui s’étend du 16 au 23 juillet 1812) ouvre d’autres pistes, fait échafauder au lecteur d’autres hypothèses sur „l’affaire“ qui occupe Victoire, „contente d’avoir pu contempler de près l’Impératrice et le faste de la Cour“. Ses soupçons liés à de la contrebande à Metz sont un scénario plausible. Le journal de Victoire est parfois interrompu par un accouchement, qui rappelle qu’elle est aussi sage-femme. Cela dit, et si Blaise Coignard, „l’ordonnance“ de Thomas Drouin, „fouinait dans son sac pour y chercher un objet qui le compromettait dans l’affaire de Metz? Mais qu’aurait-il pu y trouver“? La troisième partie, quant à elle, qui s’étend du 4 septembre au 20 décembre 2012, met en scène le procès et donne certaines clés d’une énigme que le lecteur s’est plu à suivre et à tenter de déchiffrer en fonction des indices qu’Anne Villemin-Sicherman sème ici et là dans un récit haletant et bien ficelé qu’on a du mal à quitter avant de découvrir le fin mot de l’histoire dont les tenants et les aboutissants sont dévoilés au grand jour.

En définitive, l’auteure, en plus de son talent pour recréer des atmosphères et des contextes historiques, parvient avec brio à donner une épaisseur d’âme à ses êtres de papier dont le contact par la lecture, sous-tendue par une écriture fluide et savoureuse, constitue autant de lumière et d’oxygène pour l’esprit du lecteur. On aime s’imaginer dans la peau de Victoire Montfort, héroïne intelligente qui surmonte des défis difficiles grâce à ses compétences et à ses connaissances uniques, sans oublier les explorations fictionnelles de cette période historique réelle qui nous apprend beaucoup sur l’histoire, la société et sur ce que nous avons en commun avec les gens ayant vécu avant notre époque.

Anne Villemin-Sicherman, „1812, le Fiancé de Russie: une enquête de Victoire Montfort“, 10/18, Paris, 2024; ISBN-13 978-2264083685; 342 pages; 15,90 euros

L’auteure

Anne Villemin-Sicherman, née en 1951, est une écrivaine française. Son genre littéraire fort: des romans policiers historiques. Dans sa „Série Victoire Montfort“, les intrigues se déroulent essentiellement à Metz à la fin du XVIIe siècle. Avant de se lancer dans la littérature, Villemin-Sicherman travaillait comme gynécologue.